Comestibilité et toxicité

 

Préambule

Avant toute chose, il faut savoir qu’il n’existe aucune recette miracle ni aucun test pratique qui permette de dire si un champignon est toxique ou comestible.
Seule la reconnaissance de l’espèce à partir de caractères botaniques est valable.
Aussi, améliorer ses connaissances au sujet des champignons et développer ses capacités à identifier les principales espèces comestibles et toxiques, c’est se prémunir contre les risques d’intoxication.

 

 

 

- Toxicité des champignons -

 

Des intoxications de différentes origines…

 

1/ La toxicité innée
C’est la toxicité naturelle d’une espèce donnée, due aux substances nocives qu’elle contient.
Il existe plusieurs syndromes* et chacun doit être traité spécifiquement.
D'une manière générale, les intoxications à incubation courte (inférieure à 6 heures) ne sont habituellement pas mortelles. Elles demandent néanmoins un traitement approprié.
Les intoxications à incubation longue (supérieure à 6 heures et jusqu'à plusieurs jours pour certaines espèces) indiquent un empoisonnement grave à l'issue souvent mortelle. Lorsque les premiers symptômes apparaissent, il est souvent trop tard car les toxines responsables ont déjà commencé leur travail de destruction d’organes essentiels tels le foie ou les reins.

* Syndrome : ensemble des signes et des symptômes qui caractérisent une affection.

 

 

2/ La toxicité acquise
Elle n’est pas due au champignon lui-même, mais aux produits toxiques que celui-ci est capable d’emmagasiner.
Ainsi, un champignon parfaitement comestible peut être rendu nocif par une pollution extérieure.
Trois types principaux de produits sont mis en cause : les métaux lourds, les pesticides et les radioéléments.
- Les métaux lourds sont généralement captés par les champignons qui poussent aux abords des routes, des aéroports ou à proximité des zones industrielles et des usines polluantes.
- Les pesticides, mais aussi les engrais qui proviennent de l’agriculture sont une source de contamination importante. Ainsi, les Agarics et autres Lépiotes qui viennent habituellement dans les prés ou les champs de maïs peuvent être à l’origine de graves intoxications.
- Les radioéléments proviennent de sources diverses comme la catastrophe de Tchernobyl, les essais nucléaires, la radioactivité naturelle…

 

 

3/ Les « on-dit » trompeurs
Les préjugés concernant la comestibilité ou la toxicité des champignons sont au moins aussi dangereux que les champignons eux-mêmes.
Ils sont chaque année la cause de nombreuses intoxications et il est souvent difficile de convaincre leurs partisans que seule est valable la connaissance botanique de l’espèce.

Quelques exemples :

- Certains prétendent que les champignons mangés par les limaces sont comestibles.

 

- Certains prétendent que tous les champignons printaniers sont comestibles.
 
- Certains prétendent que les champignons violets sont comestibles.

- Certains prétendent que les champignons qui poussent sur les arbres sont comestibles.

- Certains prétendent que tous les champignons dont la chair change de couleur à la cassure sont toxiques.

 

- Certains prétendent que la dessiccation rend consommables tous les champignons.

 

- Certains prétendent que lors de la cuisson, un objet en argent ou une gousse d’ail noircissent s’ils sont en présence de champignons toxiques…
… Tous ces « on-dit » sont faux bien entendu. 
 

 

4/ La consommation excessive
Il ne faut pas perdre de vue que de nombreuses espèces sont indigestes. Celles-ci peuvent provoquer des troubles gastriques quand elles sont consommées en excès ou par des personnes fragiles et il semble opportun de rappeler ici que tous les individus ne sont pas dotés de la même sensibilité.
Quant aux Gyromitres, ils peuvent carrément causer la mort lorsqu’ils sont consommés frais et lors de repas successifs.

 

 

5/ Les préparations inadéquates
La notion de comestibilité peut dans certains cas devenir restrictive et soumise à conditions.
Certains champignons donnés comestibles peuvent entraîner de sérieux ennuis lorsqu’ils sont consommés crus ou insuffisamment cuits. C’est le cas notamment d’Amanita rubescens et de l’ensemble des Amanitopsis, de plusieurs ascomycètes comme les Morilles et de certaines Pézizes qui contiennent des substances hémolytiques détruites par la chaleur. Les symptômes sont d’ordre digestif, accompagnés de nausées et vomissements.
Certains bolets du genre « Suillus » comme S. granulatus, S. collinitus, S. luteus,
S. grevillei… peuvent s’avérer purgatifs lorsqu’ils sont consommés sans être débarrassés de leur cuticule visqueuse.
Nous pouvons également citer le cas de Coprinopsis atramentaria (Coprin noir d’encre), qui, consommé avec des boissons alcoolisées, peut provoquer un syndrome cardio-vasculaire. Ce dernier se traduit par des rougeurs de la face dues à une intense vasodilatation ainsi que des troubles cardiaques.
Généralement sans gravité, cette intoxication peut parfois s’avérer très dangereuse chez les sujets présentant une faiblesse cardiaque.

 

 

6/ Le manque de fraîcheur
Les champignons sont des organismes fragiles pouvant se dégrader rapidement. Il est donc indispensable de ne consommer que des spécimens en parfait état de fraîcheur. Il ne viendrait à l’esprit de personne de consommer un morceau de viande avariée ou un légume pourrissant ; alors il doit en être de même pour les champignons.
L’amateur restera particulièrement vigilant en ce qui concerne les espèces lignicoles comme Armillaria mellea (Armillaire couleur de miel), Armillaria ostoyae ou encore Collybia fusipes car ces champignons, peu fragiles, peuvent demeurer de nombreux jours voire plusieurs semaines sur la souche ou l’arbre qui les accueille. Chargés de bactéries, de moisissures de toutes sortes… ils deviennent alors impropres à la consommation.

 

 

En cas d’intoxication, il est indispensable de prendre contact le plus rapidement possible avec le centre antipoison le plus proche ou un médecin.
Il convient alors de bien observer les symptômes et de faire des photos de l'espèce incriminée, lorsque cela est possible.

 

 

 

 

- Centres Antipoison et de Toxicovigilance -

 

                                ANGERS   02.41.48.21.21

                       BORDEAUX   05.56.96.40.80

                           LILLE   08.00.59.59.59

                           LYON   04.72.11.69.11

                       MARSEILLE   04.91.75.25.25

                          NANCY   03.83.22.50.50

                           PARIS   01.40.05.48.48

                     STRASBOURG   03.88.37.37.37

                       TOULOUSE   05.61.77.74.47

 

 

 

 

 

- Comestibilité des champignons -

 

Si l’on se réfère à la définition du Petit Larousse… « Comestible signifie : qui peut servir de nourriture à l’homme » ; il est vrai qu’un grand nombre de champignons s’avèrent consommables.
Pour autant, tous ne présentent pas de caractères gustatifs intéressants.
La notion de comestibilité se réfère donc uniquement à l’innocuité de l'espèce et n’informe en aucun cas sur la qualité gastronomique d’un champignon.
Pour hiérarchiser l’intérêt culinaire, la plupart des auteurs utilisent les adjectifs « médiocre, bon, excellent »… ce qui permet de se faire une idée plus précise, mais néanmoins subjective, de l’espèce citée.

Quant aux champignons qualifiés de :
- impropre à la consommation
- à rejeter
- sans intérêt...
ils doivent être systématiquement écartés de toute utilisation alimentaire.

 

Toute cueillette destinée à la consommation devra se faire dans des milieux sains et naturels, loin des villes et des bords de routes, des champs cultivés et des abords d’usines.
L’intégralité de la cueillette sera vérifiée par un pharmacien ou un mycologue.

 

                               

1) Les confusions du printemps...

Les premières intoxications arrivent avec le printemps.

Elles concernent pour la plupart, les Morilles et champignons ressemblants.

Nous distinguons principalement 2 types d'intoxications :

1/ La consommation de Morilles crues ou mal cuites.

2/ La confusion avec les Gyromitres.

Quelques explications...

Les Morilles

à la coupe, le chapeau et le pied montrent une seule cavité.

La marge est soudée au pied.

L'hyménium est composé d'alvéoles.

Les Morilles sont toxiques crues. Elles ne peuvent être consommées que bien cuites et en petite quantité.

 

 

Morchella esculenta (Morille comestible)

 

 

Morchella deliciosa (Morille délicieuse)

Les Verpes

Le chapeau est posé sur le sommet du pied.

La marge est distinctement séparée du pied.

L'hyménium est plissé ou apparaît presque alvéolé.

Les Verpes sont toxiques crues. Elles ne peuvent être consommées que bien cuites.

 

 

Verpa bohemica (Verpe de bohème)

 

 

Verpa conica (Verpe conique)

Les Mitrophores

A la coupe, le chapeau apparaît à moitié libre.

La marge n'est pas soudée au pied.

L'hyménium est composé d'alvéoles.

Les Mitrophores sont toxiques crus. Ils ne peuvent être consommés que bien cuits.

 

 

Mitrophora semilibera (Mitrophore à demi-libre ou Morillon)

 

 

Mitrophora fusca

Les Gyromitres

A la coupe, le chapeau et le pied présentent généralement plusieurs cavités.

La marge est soudée au pied par endroits.

L'hyménium est en forme de cervelle ou composé de méandres et de replis +/- grossiers.

Autrefois consommés avec beaucoup de précautions, ces champignons mortels crus ou mal cuits sont aujourd'hui totalement déconseillés. A proscrire absolument (même bien cuit).

 

 

Gyromitra esculenta (Fausse Morille)

 

 

Gyromitra gigas (Gyromitre géant)

2) Les confusions de l'été et de l'automne...

Lorsque les pluies sont au rendez-vous, c'est en été que le départ des premières poussées fongiques est donné. Celles-ci vont s'étaler ensuite durant tout l'automne au gré des conditions climatiques favorables.

Chanterelles et Cèpes font généralement partie des premiers champignons recherchés.

 

Les chanterelles

Elles se caractérisent surtout par leur hyménium muni des plis ou des veines (et non de véritables lames). Elles sont essentiellement terrestres.
Cantharellus cibarius (Girolle) présentée ici, montre une coloration générale jaune vif ; sa chair à une odeur fruitée.

C'est un bon comestible, mais attention aux confusions avec la Fausse girolle ou pire, le Clitocybe de l'olivier et le Clitocybe trompeur.

 

 

Cantharellus pallens (Girolle pruineuse)

Se distingue de la Girolle par son chapeau et son pied +/- recouverts d'une pruine blanchâtre labile.

Bon comestible, moins parfumé.


Hygrophoropsis aurantiaca (Fausse girolle)

Hyménium muni de lames véritables. Celles-ci sont typiquement fourchues.

La couleur générale est jaune à orangé vif sur le frais.
La chair n'a pas d'odeur particulière.

Espèce venant sur le sol des forêts ou occasionnellement sur les souches pourrissantes.

Consommé mais parfois mal supporté. A rejeter.

 

 

Lames typiquement fourchues d'Hygrophoropsis aurantiaca

(Fausse girolle)

Omphalotus olearius (Clitocybe de l'olivier) espèce plutôt méridionale.

Omphalotus illudens (Clitocybe trompeur) se rencontre plus au nord.

Hyménium mini de lames ; couleur générale jaune orangé vif mais parfois brun fauve sur le chapeau.

Ces 2 espèces macroscopiquement semblables, viennent souvent en touffes sur les souches ou les racines d'arbres feuillus, plus rarement sur conifères.

Toxiques
Syndrome résinoïdien : sévères troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhées).

Les Bolets comestibles ou Cèpes.

Ils sont au nombre de quatre :

- (1) Boletus aereus (Cèpe bronzé).

- (2) Boletus aestivalis (Cèpe d'été).

- (3) Boletus edulis (Cèpe de Bordeaux) notre photo.

- (4) Boletus pinophilus (Cèpe des pins).

Leurs chapeaux sont de couleurs variables, (1) brun sombre à noirâtre, (2) café au lait à brun, (3) brun, (4) brun rouge à acajou.

Caractères communs :

- hyménium tapissé de pores blanchâtres chez les jeunes, puis jaune olivâtre, enfin verdâtres à maturité.

- chair blanche, non bleuissante.

Ce sont de bons comestibles.

 

 

(1) Boletus aereus (Cèpe bronzé)

Chapeau brun sombre à noirâtre.

Surtout sous les chênes.

 

 

(2) Boletus aestivalis = Boletus reticulatus (Cèpe d'été)

Chapeau café au lait à brun ; précoce.

 

 

(3) Boletus edulis (Cèpe de Bordeaux)

Chapeau brun.

Le plus commun.

(photo montrant des exemplaires jeunes)

 

 

(4) Boletus pinophilus (Cèpe des pins)

Chapeau brun rouge à acajou.

Groupe des " Bolets Satan " ou Bolets à pores rouges.

Ce groupe renferme plusieurs espèces qui ont en commun...

- Chapeau : pâle grisâtre ou café au lait, parfois +/- teinté de rosâtre.

- Hyménium : tapissé de pores jaune orangé à rouges.

- Pied : souvent teinté de rosâtre ou de rouge.

- Chair : +/- bleuissante à la coupe.

Toxiques
Syndrome résinoïdien : sévères troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhées).

Les Agarics

Les plus connus sont le Champignon de Paris et le Rosé des prés (notre photo).

Leurs caractéristiques principales :

- Hyménium muni de lames.

- Lames pâles chez les jeunes puis rosâtres, enfin noirâtre à maturité.

- Pied orné d'un anneau.

- Sporée pourpre noirâtre.

Le genre comprend quelques bons comestibles à l'image du Rosé des prés ; celui-ci se reconnait à son chapeau blanc non jaunissant, ses lames bien roses (avant noircissement), son pied orné d'un anneau peu ample, et sa venue dans les pâturages.
Attention toutefois aux forts risques de confusions avec les Agarics du groupe "Xanthodermus" (Agarics jaunissants), toxiques.


 

 

Agaricus sylvicola (Agaric des bois)

Chapeau blanc, jaunissant +/- nettement au toucher ou dans la vieillesse.

Pied orné d'un anneau ample.

Chair à odeur d'anis.

Vient dans les forêts.

Comestible. 

Groupe des " Xanthodermus " ou Agarics jaunissants.

Plusieurs espèces composent ce groupe de champignons toxiques ; certains ont un chapeau blanc, d'autres grisâtre, lisse ou +/- écailleux.

Leurs caractéristiques principales :

- Fort jaunissement du chapeau au frottement et de la base du pied au grattage.

- Odeur de phénol ou d'encre scolaire.

Toxiques.

Syndrome résinoïdien : sévères troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhées).

 

 Agaricus bresadolanus (Agaric radicant)

Autre espèce toxique, qui ne fait cependant pas partie des "Xanthodermus".

Chapeau couvert d'écailles fibrilleuses brunâtres.

Pied prolongé par une sorte de "racine". Lisières, jardins, parcs...

Les Lépiotes

La plus connue est la Lépiote élevée ou Coulemelle (Macrolepiota procera).

Par ses grandes dimensions, elle passe rarement inaperçue.

Elle est recherchée pour sa comestibilité mais souvent à l'origine d'intoxications par les risques de confusions qu'elle peut occasionner... Ceci pour rappeler que toutes les grandes Lépiotes ne sont pas forcément comestibles contrairement à une idée souvent répandue.

En ce qui concerne les "petites Lépiotes" (espèces < à 10 cm), un grand nombre d'entre elles sont toxiques voire mortelles. La prudence s'impose !

 

Macrolepiota procera (Lépiote élevée ou Coulemelle)

Chapeau écailleux pouvant atteindre 30 cm de diamètre. Anneau double, épais, coulissant. Pied généralement orné de chinures irrégulières. Chair blanche, immuable.

Seul le chapeau est comestible ; le pied, très fibreux, est indigeste.

 

Chlorophyllum rhacodes (Lépiote déguenillée)

Chapeau écailleux. Anneau double et coulissant. Pied lisse (non chiné).

Chair blanche, devenant rapidement rouge safran à la coupe, puis brunissante.

Considérée comme comestible mais parfois mal supportée. A éviter.

 

Chlorophyllum brunneum

Ressemble fortement à l'espèce précédente mais montre un chapeau à mèches généralement moins nombreuses. Anneau simple. Chair idem.

Vient dans les forêts, jardins, parcs, compost...

Provoque des intoxications gastro-intestinales.

 

Chlorophyllum venenatum (parfois synonymisé avec C. brunneum)

Chapeau à écailles souvent disposées en étoile. Anneau simple. Chair blanche, devenant rapidement rouge safran à la coupe, puis brunissante.

Vient en troupes ou en petites touffes dans les jardins, fossés, détritus, compost...

Provoque des intoxications gastro-intestinales.

 

Lepiota cristata (Lépiote à crêtes)

Chapeau jusqu'à 7 cm de diamètre, orné d'écailles brun fauve sur fond blanc. Anneau fragile. Odeur de caoutchouc.

Vient sur les sols riches en azote, les parcs...

Non comestible.

Lepiota subincarnata

Chapeau jusqu'à 7 cm de diamètre, orné d'écailles brun rosâtre sur fond blanc ; centre plus sombre.

Pied marqué de quelques guirlandes irrégulières de la couleur du chapeau. Odeur fruitée légère, parfois de mandarine.

Bois, parcs, jardins...

Mortel